Selon un rapport du département américain de la défense, Pékin pourrait disposer de 700 ogives d’ici six ans et de plus de 1 000 d’ici 2030.
Selon un nouveau rapport du Pentagone, la Chine développe sa force nucléaire beaucoup plus rapidement que ne le prévoyaient les responsables américains il y a tout juste un an, ce qui témoigne d’un renforcement général et accéléré de sa puissance militaire, conçu pour permettre à Pékin d’égaler ou de dépasser la puissance mondiale des États-Unis d’ici le milieu du siècle.
Le nombre d’ogives nucléaires chinoises pourrait passer à 700 d’ici six ans, selon le rapport, et pourrait atteindre 1 000 d’ici 2030. Le rapport publié mercredi ne précise pas le nombre d’armes dont dispose la Chine aujourd’hui, mais il y a un an, le Pentagone avait déclaré que ce nombre était de l’ordre de « 200 » et qu’il était susceptible de doubler d’ici la fin de la décennie.
Ces chiffres seraient toujours nettement inférieurs à l’arsenal nucléaire américain actuel, qui compte environ 3 750 armes nucléaires. L’administration Biden a entrepris une révision complète de sa politique nucléaire et n’a pas indiqué comment elle pourrait être influencée par ses préoccupations concernant la Chine.
Le rapport ne suggère pas un conflit ouvert avec la Chine, mais il s’inscrit dans le cadre de l’émergence d’un discours américain sur l’Armée populaire de libération, qui entend défier les États-Unis dans tous les domaines de la guerre – air, terre, mer, espace et cyberespace. Dans ce contexte, les responsables américains de la défense ont déclaré qu’ils se méfiaient de plus en plus des intentions de la Chine en ce qui concerne le statut de Taïwan.
L’évolution des capacités et des concepts de l’APL continue de renforcer la capacité [de la Chine] à « combattre et gagner des guerres » contre un « ennemi puissant » – un euphémisme probable pour désigner les États-Unis », indique le rapport, qui ajoute que la Chine est ainsi plus à même de contraindre Taïwan, l’île autonome qu’elle revendique comme son territoire.
Le rapport de mercredi est le dernier rappel au Congrès, déjà méfiant à l’égard des ambitions militaires de Pékin, que les fréquentes promesses du Pentagone de se concentrer plus intensément sur la lutte contre la Chine n’ont que très peu dépassé le stade de la discussion.
La modernisation militaire de la Chine se poursuit sur un large front, mais ses avancées nucléaires sont particulièrement remarquables.
Selon le rapport, les Chinois ont peut-être déjà établi ce que l’on appelle une triade nucléaire – la combinaison de missiles terrestres, maritimes et aériens dont les États-Unis et la Russie disposent depuis des décennies. À ses forces nucléaires terrestres et maritimes existantes, la Chine ajoute un missile balistique lancé par voie aérienne.
Le rapport du Pentagone se fonde sur des informations recueillies jusqu’en décembre 2020 et ne reflète donc pas, ni même ne mentionne, l’inquiétude exprimée le mois dernier par le général Mark Milley au sujet des essais d’armes hypersoniques chinoises qui, selon lui, ont constitué une surprise troublante.
Dans des remarques peu avant la publication du rapport mercredi, Milley a déclaré au Forum sur la sécurité d’Aspen que le test de missile hypersonique et d’autres avancées chinoises étaient la preuve de ce qui est en jeu pour le monde.
« Nous assistons à l’un des plus grands changements de puissance mondiale et géostratégique dont le monde a été témoin », a-t-il déclaré.
Le rapport du Pentagone indique que la Chine poursuit la mise en place d’un réseau de bases à l’étranger qui « pourrait interférer » avec les opérations militaires américaines et pourrait soutenir les opérations militaires chinoises contre les États-Unis. Le président Xi Jinping a déclaré que la Chine envisageait de devenir une puissance militaire mondiale d’ici 2049.
La vaste évaluation du Pentagone sur la stratégie militaire et le développement des forces de la Chine est la dernière d’une série annuelle de rapports au Congrès et, à certains égards, elle est plus détaillée que les versions précédentes. Par exemple, il met en doute le respect par la Chine des accords internationaux en matière d’armes biologiques et chimiques, citant des études menées par des institutions médicales militaires sur l’identification, l’essai et la caractérisation de groupes de « toxines puissantes » ayant des utilisations civiles et militaires.
La base de la prédiction du Pentagone selon laquelle la Chine va augmenter considérablement son arsenal nucléaire n’est pas précisée dans le rapport de mercredi. Un haut fonctionnaire de la défense qui a informé les journalistes avant la publication du rapport, et qui s’est donc exprimé sous couvert d’anonymat, a déclaré que la prévision reflète plusieurs développements connus, tels que l’ajout par la Chine d’une capacité de bombardier nucléaire, ainsi que des déclarations publiques dans les médias officiels chinois qui ont fait référence au fait que la Chine avait besoin de 1 000 armes nucléaires.
Le rapport affirme également que la Chine a commencé la construction d’au moins trois nouveaux champs de missiles qui « contiennent cumulativement des centaines » de silos souterrains à partir desquels des ICBM pourraient être lancés.